Au travers de Frozen, Aurelio Mergola et Sophie Linsmaux approfondissent l’univers décalé, insolent et fantaisiste qu’ils ont créé en plongeant dans le quotidien de deux antihéros.
A l’origine de Frozen se trouve une image, celle d’un camion de boucherie ouvert sur d’épaisses carcasses de viandes pendues à un crochet puis transportées sanguinolentes sur l’épaule d’un boucher. Cette image, au-delà de sa beauté esthétique, témoigne aussi de la fragilité de ces corps dépecés, mis à nu dans un contexte urbain. Assister à ce déchargement en pleine rue, à cette image contrastée de l’intime qui se mêle à l’urbain, du vivant exposé au morne, nous touche. Ce tableau nous renvoie à notre propre condition d’êtres charnels ; il nous fait prendre conscience d’un univers enfoui sous l’épaisse nuit de notre corps. Un univers que nous connaissons à peine : nos entrailles, notre intérieur, nos viscères.
Sous nos apparences « clean » et maitrisées d’où rien ne peut dépasser et contrarier, se trouve un amas de sang et d’os, de chair et d’organes, un fouillis cohérent de viscères et de tissus nous rappelant la fragilité de la condition humaine.
C’est cet univers, d’ordinaire invisible, que nous sommes désireux de creuser aujourd’hui. Nous avons la volonté de déshabiller au-delà de la peau, d’enlever encore et encore comme si l’envers du décor était plus parlant que la scène elle- même.
Sur notre plateau, avec Frozen nous délestons le corps de sa couche externe, et par là, dévoilons une autre facette de l’humain, celle enfouie dans l’intimité de tout homme.
26, 27, 28 mars 2015 festival XS Théâtre National
Reprise : Festival d’Avignon, Jardin de la Vierge du Lycée Saint-Joseph, les 23, 24, 25 juillet 2015